La Provence samedi 26 janvier 2002

Les enfants de Marie-Andrée Fesquet évoquent son souvenir

"J'ai imaginé la mort de notre mère des dizaines de fois"

Drapés dans leur douleur digne, sans haine et avec beaucoup de lucidité, Cathy et Philippe, deux des quatre enfants de Marie-Andrée Fesquet, cette grand-mère de 69 ans violée et tuée à Avignon le 7 janvier dernier, n’auraient aujourd’hui qu’un seul souhait "Que ce crime ne soit pas banalisé, ni oublié". C’est pour cette raison, qu’ils ont accepté d’évoquer le souvenir de leur mère, épaulés par leur avocat qui s’est constitué partie civile, Me Marc Geiger.

Protégés des détails sordides de l’enquête par des policiers dont ils soulignent "la bonté humaine", ils n’ont néanmoins pas été épargnés, souvent bien involontairement, par l’entourage. "C’est une voisine qui m ‘a appris que ma mère avait été violée. Vous imaginez le choc" glisse, la gorge nouée Cathy. La presse, ils évitent de la lire. "C’était trop dur, confie Philippe. Mais je garde tout pour le procès. Ça m ‘aidera sûrement à affronter les deux accusés à la barre". Pour l’heure, ils se concentrent sur leur deuil, ne souhaitent pas suivre de près le déroulement de l’enquête ni savoir qui sont les deux jeunes meurtriers présumés de leur mère.

"Ils ne sont pas les seuls responsables"

"C’est un fait de société avant tout. Cela aurait pu arriver à ‘importe qui. il faut que tout le monde comprenne ça. Ces jeunes ont frappé au hasard. Pour nous, ils ne sont pas les seuls responsables. Ma mère avait été cambriolée plusieurs fois déjà La voix brisée, Philippe insiste. "Cette affaire-là ne doit pas être récupérée politiquement. Mais on doit savoir que, comme la foudre, ce genre de drame peut vous frapper à tout moment. "Moi, je n ‘ai pas besoin de photo, murmure Cathy. Depuis que j’ai appris que ma mère était morte dans ces conditions, j‘ai imaginé la scène des centaines de fois. Tous les soirs, lorsque je me couche, je vois des images horribles. J’aurai ces flashs en tête toute ma vie. Et croyez-moi, j‘aimerais plutôt avoir en mémoire le visage rieur de ma mère". Une mère "pétillante", célèbre pour "ses éclats de rire", "à la joie de vivre communicative". "Les gens s‘attachaient à elle immédiatement. Elle ne faisait que rire, chanter et avait toujours un mot gentil à la bouche". "Ce meurtre, c ‘est l’inverse d’elle, assène Philippe. Maman était un ange, elle a été enlevée par des démons". Le pardon, un jour, sera-t-il possible ? "La seule qui pourrait pardonner, c‘est notre mère". . Les visages se ferment. Une promesse, une dernière. "Nous créerons une association, ou une autre structure en sa mémoire... Enfin, nous allons essayer de faire en sorte que ce genre d’atrocités ne se reproduise plus jamais" .

Laetitia Sariroglou

Un hommage à Marie-Andrée Fesquet sera rendu le 29 janvier à 14 heures a l’Opéra d’Avignon. A cette date, elle aurait dû chanter "New York-New York" en hommage aux victimes des attentats terroristes du 11 septembre.